Un site d’habitat majeur de la fin de la Préhistoire en cours de fouille à Charmé

Par Vincent Ard (CR CNRS, UMR 5608 TRACES)

Dans le cadre d’un projet collectif de recherche, financé par le Ministère de la Culture et le département de la Charente, une fouille a été engagée en 2014 sur le site d’habitat néolithique de Charmé, près du lieu-dit le Peu. Il s’agit d’une enceinte à fossé et palissades interrompus découverte par Eric Bouchet en prospection aérienne en mai 2011, grâce aux indices visibles dans la maturation des céréales. D’une surface maximale de sept à huit hectares, elle se situe sur un promontoire calcaire, en tête d’un vallon où coule le ruisseau du Bief. Les structures fossoyées, orientées NO/SE, barrent la partie ouest du promontoire, encadré par un marais humide au Néolithique. L’étude des pollens anciens atteste d’un paysage ouvert au Néolithique lié aux défrichements opérés lors de l’occupation du site.

Des prospections géophysiques menées en collaboration avec l’université de La Rochelle dès 2013 ont permis de dresser un plan complet du site et de guider l’ouverture des fenêtres de fouilles.
Depuis 2014, à raison d’un mois de fouille par an au cours de l’été, des fouilles sont menées dans différents secteurs du site. L’équipe de fouille est composée de chercheurs, d’étudiants et de bénévoles venant de toute la France et de l’étranger. La première campagne, en 2014 a révélé l’intérêt majeur du site du fait de sa datation (milieu du 5e millénaire avant notre ère), qui en fait un habitat contemporain de l’édification des premiers mégalithes du Ruffécois, et de l’exceptionnelle conservation des vestiges (niveaux de sol, mur en terre crue, foyers…). L’environnement du site est particulièrement remarquable par la présence de nombreux dolmens et tumulus, en particulier les longs tumulus de Tusson, situés à moins de 2 km et classés parmi les plus grands d’Europe.

 

En 2015 et 2016, grâce aux résultats de la prospection géophysique, les traces de quatre bâtiments sur poteau ont été mis au jour. Conservés uniquement sous forme de trous de poteau, ces maisons sont établies au sommet du promontoire, derrière un système de protection composé d’un large fossé et d’une double tranchée de palissade. Plusieurs fosses ont également été découvertes et les vestiges qu’elles contenaient (tessons de poterie, silex, os d’animaux) permettent d’en savoir plus sur les activités domestiques des occupants du site. Au pied du versant, au bord de l’ancienne berge du marais, les sols néolithiques sont conservés et livrent également de nombreux vestiges.
La dernière campagne, en août 2017, a permis d’explorer un système complexe d’entrée de cette enceinte et d’étudier de manière fine et pluridisciplinaire la zone basse qui constituait au Néolithique une zone marécageuse. De nombreux spécialistes collaborent à l’étude de nombreux vestiges et prélèvements recueillis : spécialistes des industries néolithiques, des formations géologiques, des pollens et charbons anciens, des coquillages…
Cette enceinte apparait d’ores et déjà comme un site de référence pour la connaissance du Néolithique de l’ouest de la France et une nouvelle campagne de fouille est programmée en août 2018.
Nous tenons à remercier les propriétaires du site (Mmes Lebreton) et les municipalités de Charmé et Tusson pour leur soutien logistique pour l’accueil de l’équipe de fouille.