Mise en valeur de l’un des plus grands sites mégalithiques d’Europe.
Au Néolithique, sans doute dès le Ve millénaire avant notre ère, le promontoire de la Folatière, sur la commune de Luxé (Charente), est occupé par un habitat ceinturé de fossés, récemment mis en évidence au cours de prospections géophysiques, mais également par une exceptionnelle nécropole mégalithique composée d’au moins quatre monuments. De cette nécropole ne subsiste aujourd’hui que les restes d’un dolmen et un imposant tumulus boisé, méconnu, qui appartient à la catégorie des « tumulus géant » chère au préhistorien charentais Claude Burnez. Ces deux édifices sont classés au titre des Monuments Historiques depuis 1957.
Plusieurs millénaires d’histoire
Le tumulus de la Folatière mesure près de 140 m de long, 20 à 50 m de large pour une hauteur de 10 m. Hormis le Gros Dognon situé sur la commune voisine de Tusson, aux dimensions proches, on ne trouve aucun monument de cette taille dans toute l’Europe néolithique ! Dès le XIXe siècle, l’abbé Michon (1844) signale qu’il est employé comme carrière de pierre par les habitants du hameau de la Folatière dont les maisons sont bâties au plus près du tumulus. Seuls quelques vestiges d’époque romaine sont alors recueillis dans les terres remaniées (Lièvre, 1883). Plus récemment, dans le cadre d’un programme financé par l’Agence Nationale de la Recherche (projet MONUMEN, coord. V. Ard et V. Mathé), un relevé du monument a été réalisé par captation LiDAR par drone. Il confirme les dimensions exceptionnelles du monument et révèle plus nettement sa morphologie constituée de plusieurs buttes circulaires, comme l’avait souligné en son temps l’abbé Michon. En dépit de son classement au titre des Monuments Historiques, ce tumulus tombe dans l’oubli et subi de nouvelles dégradations au cours du XXe siècle.

Cartographie géomagnétique de l’environnement de la nécropole mégalithique de la Folatière et localisation des tranchées de la fouille 2024 sur l’habitat fossoyé. ©ANR MONUMEN (F. Lüth, G. Bruniaux, H. Vitté)
À une cinquantaine de mètres, sur la pente nord-est du coteau, A.-F. Lièvre signale la présence d’une grande dalle de couverture d’un dolmen, dit de Gavalet, reposant sur des piliers affaissés. Entre 1957 et 1959, des fouilles conduites par le doyen Etienne Patte sont menées sur ce monument alors menacé de destruction (article : Le dolmen de la Folatière à Luxé Etienne Patte) Délimitée par 12 piliers, dont certains renversés, la chambre funéraire en partie excavée est apparue très bouleversée. De nombreux restes humains appartenant à au moins 42 individus (dont 16 adultes), des tessons de céramiques parfois décorées, des centaines d’éléments de parure et des outils en silex sont alors recueillis. Ce mobilier remarquable, attestant d’une utilisation du sépulcre pendant près de deux millénaires, est aujourd’hui conservé au musée de la Ville de Poitiers.
Des deux autres monuments mégalithiques de la nécropole, encore visibles au XIXe siècle, celui du Roc, au sud-ouest du grand tumulus, et de Bel Air, au sud du hameau, il ne subsiste qu’un pilier calcaire portant une gravure de crosse en champlevé, aujourd’hui conservé dans les salles du musée des Beaux-Arts d’Angoulême.

Profil nord du « tumulus géant » de la Folatière établi à partir des données LiDAR.©ANR MONUMEN (C. Calastrenc, N. Poirier, A. Laurent)
Sauvegarder et conserver
Pour préserver et mettre en valeur ce patrimoine néolithique exceptionnel, l’association MégaNéo décide de s’engager au cours de l’été 2024 dans une opération exceptionnelle d’acquisition foncière du tumulus et du dolmen de la Folatière situés sur des parcelles privées et inaccessibles. La mise en œuvre de cette action est votée à l’unanimité par les adhérents lors d’une Assemblée Générale exceptionnelle en novembre de la même année.
Mais cette opération de sauvegarde originale n’est pas simple ! Il faut d’abord convaincre les cinq propriétaires concernés de se séparer d’une partie de leurs terrains puis procéder à la division de l’ensemble des parcelles concernées afin de circonscrire les deux monuments, ménager un accès et un parking en bordure de la D186. Pour ce faire, un partenariat avec le cabinet de géomètre-expert Heteria est mise en place et le bornage des parcelles est engagé dès la fin de l’année 2024. Une fois les nouvelles parcelles créées, la procédure d’acquisition peut être lancée et la vente est signée le 12 mai 2025 à l’office de Maître Geoffroy à Ruffec, moins d’un an après le lancement de l’opération.

Coupe à socle découverte dans le dolmen de Gavalet, aujourd’hui conservée au musée de la ville de Poitiers. D’après Patte 1966.
Appel aux dons pour mettre en valeur ce monument d’exception
Première étape du projet de mise en valeur du site, l’acquisition du site offre aujourd’hui une opportunité unique de redonner vie à ce site exceptionnel. Pour ce faire, un appel aux dons est lancé en juin 2025 pour permettre à l’association de poursuivre son action en procédant au nettoyage du site et à son aménagement, en étroite collaboration avec les services de l’État (DRAC Nouvelle Aquitaine) et avec le soutien des collectivités locales (département de la Charente, communauté de communes Cœur de Charente, commune de Luxé).
Remerciements : nous tenons à remercier l’ensemble des propriétaires concernés par la vente, le cabinet de géomètre-expert Heteria, l’office notariale de maître Fabrice Geoffroy, la municipalité de Luxé et la communauté de communes Cœur de Charente.